
« L’approche doit être basée sur les intérêts de la Tunisie, sans pour autant adopter un discours tendu. Ce n’est pas une question de remplacement des partenaires, mais c’est une affaire de diversification des ressources diplomatiques ».
Le Chef de l’Etat vient de regagner la Tunisie après une visite historique en Chine. Dimanche, le Chef du gouvernement s’est envolé pour la Corée du Sud pour prendre part au Sommet Corée-Afrique. Pour les observateurs de la scène diplomatique, la diplomatie tunisienne est en pleine métamorphose et se mobilise sur tous les fronts, alors qu’un nouvel ordre mondial semble se former accéléré par la fracture provoquée par le massacre sioniste à Gaza.
En effet, un nouvel échiquier diplomatique mondial est en train de prendre forme. L’hégémonie longtemps exercée par le camp occidental conduit par les Etats-Unis se fissure jour après jour.
La Tunisie, souhaitant diversifier ses partenaires, s’est lancée, depuis l’enclenchement du processus du 25 juillet, dans une restructuration de sa diplomatie et de sa politique étrangère en vue de nouer de nouveaux partenariats stratégiques avec des puissances mondiales et régionales.
La dernière visite de Kaïs Saïed à Pékin s’est articulée autour du concept de souveraineté nationale, affichant clairement sa détermination à préserver l’indépendance des décisions nationales.
Ainsi, au cours de cette visite considérée comme un succès, Kaïs Saïed et Xi Jinping ont-ils conjointement déclaré leur volonté de hisser les relations sino-tunisiennes au rang d’un «partenariat stratégique». Cette déclaration commune vient traduire de manière éloquente la résolution des dirigeants des deux pays de donner un nouvel élan aux relations bilatérales vers un avenir meilleur pour les deux peuples amis.
Redéploiement de la diplomatie à la lumière des nouveaux enjeux
Abdallah Laabidi, ancien diplomate, est de cet avis. Selon lui, cette visite historique intervient dans l’objectif de rompre avec l’hégémonie exercée par l’Occident, mais aussi dans l’optique de diversifier les champs d’action de la diplomatie tunisienne. «Nos relations avec les Etats-Unis étaient excellentes depuis l’indépendance lorsque ce pays défendait les valeurs et les principes et l’indépendance des Etats. Aujourd’hui, la Tunisie se tourne de plus en plus vers l’Orient et l’Extrême-Orient, notamment vers la Chine qui pourrait devenir un important partenaire de la Tunisie», a-t-il analysé à La Presse. Et de rappeler que la Chine a réalisé de grands projets en Tunisie dans le domaine de la gestion des ressources en eau, notamment.
S’agit-il d’une nouvelle approche diplomatique ? Notre interlocuteur explique qu’exercer la souveraineté réside dans le redéploiement de la diplomatie à la lumière des nouveaux enjeux et sous l’effet des développements sur la scène internationale, car nous ne pouvons pas, selon lui, mener une «diplomatie statique et figée».
«Ce rapprochement ne doit cependant pas nuire à nos relations avec nos partenaires historiques, nuance-t-il, tels que les pays européens. L’approche doit être basée sur les intérêts de la Tunisie, sans pour autant adopter un discours tendu. Ce n’est pas une question de remplacement des partenaires, mais c’est une affaire de diversification de nos ressources diplomatiques», a-t-il encore analysé.
C’est aussi dans ce cadre que le Chef du gouvernement, Ahmed Hachani, effectue une visite officielle en Corée du Sud, du 3 au 6 juin 2024, à la demande du Président de la République.
Cette visite de travail s’inscrit dans le cadre du premier Sommet Corée-Afrique, qui se tiendra à Séoul sur le thème «L’avenir que nous créons ensemble : Croissance partagée, durabilité et solidarité».
Ce Sommet ambitionne de renforcer la coopération entre la Corée du Sud et le continent africain et consolider les liens politiques et économiques, notamment dans les domaines des infrastructures, des énergies renouvelables et de la digitalisation. C’est l’occasion pour notre pays de renforcer sa nouvelle stratégie diplomatique visant à s’orienter vers de nouveaux partenaires économiques.